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Climat: Trudeau ne respectera pas l'Accord de Paris, voici pourquoi

#15 of 37 articles from the Special Report: National Observer Français
Justin Trudeau, United Nations
Le premier ministre Justin Trudeau à l'ONU le 20 septembre, 2016. Photo de la Presse Canadienne.

Il est jeune. Il est beau. Il est écolo. Enfin, il est né le divin enfant du Canada. L'humanité peut dormir en paix après l'ère ténébreuse de Stephen Harper... « Canada is back » ! Justin Trudeau nous promet des routes ensoleillées: « Sunny ways my friends, sunny ways. »

C'était il y a un an. Le Canada signait l'Accord de Paris pour maintenir le réchauffement climatique à deux degrés. La ministre de l'Environnement Catherine McKenna s'emballait en parlant même de 1,5 degré. Tout un contraste avec les conservateurs qui accumulaient les prix fossiles en environnement année après année.

Mais un détail important avait été omis: le Canada est un pays pétrolier. Au fait, il s'agit de la deuxième réserve mondiale. Le Canada, l'Alberta, la Saskatchewan, la Nouvelle-Écosse... et la Bourse de Toronto ont investi des dizaines de milliards de dollars et ils vont se battre jusqu'à la fin pour ne pas perdre leurs pétrodollars. Le hic, sans diminution de la production pétrolière nous pouvons dire bye bye à Paris, qui ira rejoindre Kyoto dans la poubelle de l'histoire canadienne.

Le show de boucane de Justin Trudeau

Au début de l'année 2015, une étude publiée dans la prestigieuse revue Nature a donné la marche à suivre: le Canada doit laisser dans son sol plus de 85 % de ses ressources pétrolières connues s'il veut aider la planète à éviter la catastrophe climatique.

On comprend qu'il est irréaliste de demander aux politiciens de fermer demain matin tous les puits de pétrole, mais on pourrait au moins commencer à diminuer la production. C'est tout le contraire: l'augmentation des sables bitumineux est estimée à 40 % d'ici 2025. Petit rappel historique: de 1990 à 2015, l'Alberta est responsable de 73 % de la hausse des émissions de GES au Canada.

Que fait Justin Trudeau ? Il conserve les cibles de réduction des gaz à effet de serre du gouvernement Harper. Cibles qu'il avait lui-même critiquées. Le plan est donc de réduire les GES de 30% en deçà du niveau de 2005 d'ici à 2030, plan qu'il ne respectera pas à l'instar de l'Accord de Paris.

Qui dit augmentation de la production des sables bitumineux, dit augmentation des GES. Les mathématiques sont plutôt simples.

Que fait Justin Trudeau ? Il brise sa promesse d'arrêter les subventions aux énergies fossiles et il veut les continuer jusqu'en 2025. En 2015, le Canada a donné en subventions 3,3 milliards de dollars aux énergies fossiles. Comme le Québec paie environ 20 % des impôts canadiens, c'est 660 millions que nous donnons aux entreprises extractives, sans compter les subventions du gouvernement Couillard aux pétrolières telles Suncor qui a reçu 1,7 million de dollars via le programme ÉcoPerformance.

Que fait Justin Trudeau ? Il tient un discours impossible, celui de réduire les GES tout en construisant de nouveaux pipelines « pour rejoindre de nouveaux marchés ». En vérité, c'est l'un ou l'autre. Pas les deux. Les pipelines, que ce soit Trans Mountain dans l'Ouest, Énergie Est dans l'Est ou Keystone XL au Sud, ont pour but d'augmenter la production des sables bitumineux. Qui dit augmentation des sables bitumineux, dit augmentation des GES. Les mathématiques sont plutôt simples.

Que fait Justin Trudeau ? Il approuve un projet titanesque d'exportation de gaz de schiste en Colombie-Britannique. S'il voit le jour, le projet va augmenter les émissions de 8,5 % dans la province et de 1 % au Canada. Suite à l'approbation, des Premières Nations et des groupes en environnement ont intenté des actions en justice contre le gouvernement.

Que fait Justin Trudeau ? Il est en train de mettre en place une taxe sur le carbone. Pour un non-initié, ça peut paraître intéressant. Le hic à nouveau ? C'est que le prix demandé varie entre 10 $ et 30 $ la tonne de carbone. Selon Marwah Rizqy, professeure adjointe en fiscalité à l'Université de Sherbrooke, pour être efficace, le prix devrait être entre 150 $ la tonne et 300 $. Par exemple, à 16 $ la tonne, c'est environ 2 sous le litre d'essence. C'est impossible de changer le comportement des consommateurs lorsque l'impact à la pompe est si faible. L'experte ajoute qu'il ne faut pas seulement taxer, il faut aussi donner des alternatives aux citoyens pour se déplacer sans auto.

Le Québec dans tout ça?

La réalité, c'est que le Québec est un joyau d'énergie verte encastré dans un Canada pétrolier. Pendant qu'Hydro-Québec tente de vendre notre électricité renouvelable aux États-Unis, des diplomates canadiens, payés également avec nos impôts, font la promotion des pipelines et des sables bitumineux.

Pendant que les fonctionnaires québécois travaillent à mettre en place un marché du carbone, ceux du Canada négocient pour faire entrer en Europe le pétrole albertain, un pétrole qui est émet 50 % plus de GES que le brut léger.

Nous sommes maintenant en novembre 2016, la COP22 se termine au Maroc et le Canada de Trudeau vient à son tour d'être nommé cancre du climat. On souligne le changement positif dans le discours, mais les babines ne suivent pas les bottines.

On nous répète sans cesse que la jeunesse est soucieuse des enjeux environnementaux. Si le Canada continue dans sa voie fossilisée, qu'il ne se surprenne pas si un matin il se réveille avec un Québec indépendant des pétrolières... et du Canada.

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